mardi 13 juillet 2010

LA "FAIM" DU MONDE...



L'Oxfam pousse un nouveau cri d'alerte désespéré : 10 millions d'Africains sont menacés de famine, principalement au Niger, au Tchad et au Mali. Plus de 400.000 enfants du Sahel risquent bien de mourir de faim. Dans l'indifférence générale. Voilà ce que j'écrivais dans mon essai "La dernière Croisade. Des Ecolos... aux Ecolomaniaques" paru en novembre 2009 aux éditions L'Arganier :

"Ne nous y trompons pas, à chaque génération ses « crève-la-faim », son lot d’actes impardonnables et irréparables, son indifférence criminelle, ses tueries et, par conséquent, quelques décennies plus tard, ses repentances.".


Charité bien ordonnée...

D’après un rapport de l’organisation humanitaire britannique Oxfam International publié le 16 octobre 2008, à l’occasion de la Journée mondiale de l’alimentation organisée par l’ONU, près d’un milliard d’habitants des pays en développement serait menacé par la famine, conséquence de la hausse du prix des denrées de base comme le riz et les céréales. En 2008 « 119 millions de personnes de plus se retrouvent dans une situation de famine et, au total, quelque 967 millions de personnes souffrent actuellement de malnutrition » a indiqué l’Oxfam. Au même moment, l’organisation CARE international, dirigée par Jonathan Mitchell, a estimé que 17 millions d’habitants de la Corne africaine étaient menacés de famine (6,4 millions d’Éthiopiens et la moitié de la population somalienne).

Selon Barbara Stocking, directrice générale d’Oxfam : « Des vies innocentes ont été brisées par leur exposition à la volatilité des marchés. ». L’inflation galopante du prix des aliments a eu un effet dévastateur sur les populations touchées et a rappelé qu’en 2007 le prix du blé au Guatemala avait augmenté de 300 %, le prix de la farine et du riz avait doublé au Cambodge et aux Philippines. Mme Stocking a tenté d’alerter la communauté internationale sur cette urgence : « Il est temps que le monde se rende compte de la nécessité que les gouvernements des pays en voie de développement aident leurs agriculteurs frappés par la pauvreté, et de l’obligation des pays industrialisés de les y aider. ».

Hélas, contrairement aux promesses faites par les pays développés en avril 2008, la mobilisation internationale ne s’est pas ou peu concrétisée, les pays riches semblant accaparés par la crise financière de septembre 2008. Sur les 12,3 milliards de dollars promis(1), seulement un milliard a été versé pour lutter contre la faim en 2008. Que sont 25 milliards par rapport aux 1.500 milliards de dollars débloqués en quelques jours par l’Europe et les Etats-Unis pour venir en aide aux banques de leurs pays au plus fort de la crise en octobre 2008 ? Et si vous vous étonnez que l’importance de la cause climatique l’emporte sur l’urgence de sauver ceux qui meurent aujourd’hui, vous trouverez toujours un donneur de leçons pour vous affirmer que l’un ne va pas sans l’autre évidemment. Si tel était le cas pourquoi, afin de financer des opérations d’assistance, Oxfam doit-il faire appel aux gens de bonne volonté pour obtenir, espèrent-ils, 30 millions de dollars de dons ? Où sont donc les dons promis, la main sur le cœur, pour lutter contre la faim ? Il semblerait bien, en dépit des beaux discours et au regard des chiffres les plus récents, que charité bien ordonnée commence par soi-même…

Pardonnez-nous car nous avons péché…

A l’heure des règlements de compte avec le passé, les fautes et les erreurs de nos ancêtres nous empêchent de regarder en face celles que nous commettons dans le présent. Celles que nous appelons aujourd’hui les « générations futures » tenteront-elles à leur tour de dénoncer, voire de racheter nos fautes, pour mieux masquer les leurs ? Ne nous y trompons pas, à chaque génération ses « crève-la-faim », son lot d’actes impardonnables et irréparables, son indifférence criminelle, ses tueries et, par conséquent, quelques décennies plus tard, ses repentances. Dans plusieurs décennies, l’heure des comptes avec un nouveau passé aura sonné et les inévitables donneurs de leçons tenteront de stigmatiser un groupe d’individus pour en faire des coupables idéaux. Dans cinquante ans, la génération au pouvoir sera sans doute trop occupée à juger nos méfaits d’aujourd’hui pour ne pas avoir à se préoccuper des siens… Comme l’a écrit Régis Debray(2) « Les repentances ont toujours cinquante ans de retard...


(1) Chaque année, la communauté internationale consacre moins de 100 milliards d’euros d’aide publique au développement alors que 150 milliards suffiraient à garantir la santé et la subsistance à un milliard d’êtres humains.".

(2) « L’Algérie et le Vietnam n’ont rien appris à nos élites, dont les repentances ont toujours cinquante ans de retard. » dit-il dans une interview au Monde parue fin 2008.


- Le site Oxfam International



Illustration empruntée au site Afrique Rédaction